Trouveurs
& trouveuses


par Denis Vanderhaeghe

alias Vercoquin
Vida :
Bernart de Ventadour fut du Limousin, du château de Ventadour. Homme de pauvre génération, fils d'un servant qui était fournier, qui chauffait le four pour cuire le pain du château. Et devint bel homme et adroit et sut bien chanter et trouver, et devint courtois et instruit. Et le vicomte, son seigneur de Ventadour, moult s'émerveilla de lui et de son trouver et de son chanter et lui fit grand honneur.
Le vicomte de Ventadour avait une femme jeune, gentille et gaie, qui s'émerveilla de Bernart et de ses chansons et s'énamoura de lui et lui de la dame, alors fit ses chansons et ses vers d'elle, de l'amour qu'il avait d'elle et de sa valeur. Longtemps dura leur amour sans que le vicomte ni les autres gens s'en aperçoivent. Et quand le vicomte s'en aperçut, il s'éloigna de lui, et la femme fut enfermée et gardée. Et la dame fit dire à Bernart son congé, qu'il parte et s'éloigne de la contrée.
Et il partit et s'en alla à la duchesse de Normandie, qui était jeune et de grande valeur et s'y entendait en prix et en honneur et en bien dire de louanges. Et lui plaisaient fort les chansons et les vers de Bernart et elle le reçut et l'accueillit moult fort. Longtemps fut à sa cour et s'énamoura d'elle et elle de lui, et fit maintes bonnes chansons d'elle. Et pendant qu'il était près d'elle, le roi Henri d'Angleterre la prit pour femme, l'éloigna de la Normandie et la mena en Angleterre. Bernart resta là, triste et dolent, et vint à la cour du bon comte Raimon de Toulouse, et y resta jusqu'à la mort du comte. Et Bernart, à cause de ctte douleur, entra dans l'ordre de Dalon,  et là il s'éteignit.
Et moi, Uc de Saint Circ, ce que j'ai écrit de lui me le conta le vicomte Eble de Ventadour, qui fut fils de la vicomtesse que Bernart aima.